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EDITORIAL

BOKO HARAM, UNE CRISE TRANSFRONTALIERE



A l’origine, Boko Haram est une secte islamique radicale fondée en 2002 à Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno, au Nord-Est du Nigeria, dont l’objectif est l’instauration d’un califat fonctionnant selon les principes de la charia. A partir de 2009, la secte se mue en un mouvement insurrectionnel et terroriste et prend en 2010 le nom de Groupe Sunnite pour la prédication et le djihad. Ses liens avec les organisations terroristes islamiques internationales sont complexes. Si Boko Haram a bien tissé des liens avec Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), elle n’en a jamais été membre, notamment du fait de conceptions divergentes de l’islam. Il en va différemment de l’Etat islamique auquel Boko Haram a fait allégeance en 2015.

Si l’ambition du groupe est d’établir un sultanat de Dieu, il se positionne d’abord à une échelle nationale nigériane et régionale Ouest africaine ; orientation qui a suscité une partition du groupe puisqu’une branche dissidente, mue par des objectifs internationaux. L’Avant-garde pour la protection des musulmans en Afrique noire (ANSARU) a été créée en 2012. Secte religieuse, Boko Haram a en effet émergé dans l’Etat le plus pauvre de la fédération nigériane les ¾ de la population y vivent sous le seuil de la pauvreté ; 98% des enfants de moins de 15 mois ne sont pas vaccinés et 50% des enfants ne sont pas scolarisés. Le groupe repose à la fois sur un réseau de mosquées et sur un réseau de marchés et de gares routières, hauts lieux de l’activité économique et principaux espaces productifs. Il s’appuie donc sur une organisation réticulaire décentralisée ; cette absence relative de hiérarchie et cette forte autonomie locale sont des éléments essentiels à son fonctionnement. Lors de ses attaques, Boko haram vise d’ailleurs particulièrement les grandes figures d’autres courants de l’islam, comme ce fut le cas au Nigéria et au Cameroun.

A l’origine problème nigérian, la secte fut d’abord traitée comme tel ; l’état d’urgence fut ainsi décrété en mai 2013 dans les Etats de Borno ; Yobe et Adamaoua : or cette situation a donné lieu à de multiples exactions policières et militaires. En outre, sous couvert de répression contre Boko Haram, la prison de Damatura, capitale de l’Etat de Yobe, s’est transformée en un véritable lieu de répression. Au Cameroun avant que la secte s’installe définitivement ; c’était des groupuscules criminels appelés coupeurs de routes, et qui s’étaient appropriés le nom de Boko Haram, qui faisaient la terreur dans le Nord du pays ; sans oublier les hauts dignitaires de cette régions qui pour régler les comptes entre eux faisaient appel à ces groupuscules, ceux-ci devenant ainsi des milices de tel ou tel El Hadj. Au fil des années, Boko Haram est cependant devenu un problème régional, son influence s’étendant au-delà des frontières du Nigéria vers le Cameroun et le Tchad ; car le modèle avoué de la secte est bien le califat de Sokolo, couvrant au XIXè siècle le Nord du Nigéria et le Nord du Cameroun contemporains. Les bords du lac Tchad et la région des monts Mandara, à la frontière entre le Cameroun et le Nigéria sont particulièrement touchés : ces confins ont longtemps fonctionné dans une dynamique transfrontalière fondée sur la contrebande et sont aujourd’hui utilisés à la fois comme des espaces refuges et comme des territoires d’expansion. En témoignent les attaques qui y sont perpétrées et les camps des réfugiés qui s’y installent. Alors que les autorités camerounaises ont peiné à réagir à la menace, les autorités tchadiennes, particulièrement soucieuses de préserver leurs ressources pétrolières et l’axe N’Djamena /Douala des attaques de la secte ont multiplié des interventions armées, y compris au-delà de leurs frontières. Un accord tripartite a été scellé entre le Nigéria ; le Cameroun et le Tchad afin de permettre cette exception aux prérogatives régaliennes des Etats. Après plusieurs années d’intervention militaires depuis 2015 ; Boko Haram a été lourdement affaibli, mais le groupe subsiste cependant et poursuit sa campagne de terreur, malgré l’existence d’une cellule internationale de renseignement à Abuja et la présence des forces françaises à N’Djamena et à Niamey.

Car la question que pose la crise suscitée par Boko Haram et son extension régionale est celle de la capacité des Etats et des armées régulières à réagir à ces crises. Dans la plupart des conflits qui frappent le continent, les forces d’interposition et d’intervention sont soit constituées de casques bleues issus des pays membres de l’ONU (Monusco en république démocratiques du Congo ou Minusca en république centrafricaine), soit d’armées des anciennes puissances coloniales liées par des accords de défense, comme c’est le cas de la France au Mali. Le manque de moyens, de matériels et de troupes compétentes est un problème récurrent et seuls quelques Etats ont fait de la formation d’une armée opérationnelle une priorité ; c’est le cas de pays marqués par une conflictualité latente (le Tchad par exemple) ou de pays cherchant à se positionner comme acteurs incontournables de la diplomatie africaine (le Rwanda et l’Afrique du Sud).

Maintenant subsiste une question primordiale, si on sait d’où proviennent les ressources financières de la secte (vente de pétrole et de drogues), elle n’a pas cependant d’usines de fabrication de thanks, de fusils d’assaut, ni de roquettes Lourdes, alors qui vend ce matériel lourd à Boko Haram?... Nous reconnaissons ici l’imaginaire fantasmatique des dirigeants africains qui croient à l’existence réelle du droit international ; et surtout à l’hypocrisie et à la face cachée de la communauté internationale (Etats-Unis ; Russie ; Chine ; Grande Bretagne ; France), sinon comment expliquer la présence de 1300 soldats d’élite américains surentraînés et suréquipés dans la zone du lac tchad?...